Une des caractéristiques de cette littérature est son apparition tardive : Les premières tentatives d'écriture pour le théâtre ont été des devoirs d'étudiants dans les écoles normales. C'est une écriture destinée à brimer les coutumes barbares de l'Afrique et à mettre en évidence la modernité après le colonialisme. Ces pièces sont essentiellement des pièces historiques dont les personnages sont des héros de la lutte contre la colonisation.
Le premier auteur de théâtre d'Afrique noire qui s'est affirmé prioritairement comme auteur de théâtre c'est :
Sony Labou Tansi dont la première pièce date de 1979 :
Sony Labou Tansi est né en 1947 au Congo, romancier, poète et dramaturge congolais, Sony Labou Tansi était un membre de l’avant-garde africaine. Son écriture satirique mais pleine d’espoir s’est confrontée à la censure à de nombreuses reprises. Les thèmes centraux de ses œuvres sont la corruption du pouvoir et la résistance. Il a souvent provoqué puis rompu les genres littéraires occidentaux en utilisant l’exagération, un langage démembré et une esthétique anti-naturaliste. Sony Labou Tansi n’a jamais abandonné la satire politique et la critique, mais, dans ses dernières œuvres, il touche aussi à des thèmes tels que l’amour, la vie et la mort.
Il a effectué en 1990, une résidence d’écriture à la Maison des Auteurs des Francophonies en Limousin. Le Festival des Francophonies a présenté et co-produit plusieurs de ses pièces parmi lesquelles La Rue des mouches, Antoine m’a vendu son destin, Moi, veuve de l’empire, Le Coup de vieux, Qui a mangé Mme D’Avoine Bergotha ? Ses pièces ont été également mises en scène : à Brazzaville, Dakar, Paris (Théâtre National de Chaillot, par Gabriel Garran), New-York (Ubu Theater, par George Wolfe).
Sony Labou Tansi est décédé le 14 juin 1995
Les thèmes de la littérature théâtrale d'Afrique noire :
La relation entre l'histoire du continent africain et les littératures africaines est très étroite et la littérature théâtrale suit le même chemin que les autres littératures :
- Dans les années 60, on est parti d'une écriture qui se définissait à partir du phénomène colonial.
- A partir des années 70, on a chassé le maître blanc, on a mis le frère au pouvoir et il s'est montré aussi odieux et tyrannique que le colon. Les dramaturges, comme les romanciers ou les poètes, se sont donné comme objectifs de montrer les déceptions des Africains face aux nouveaux dirigeants plus préoccupés par leurs propres intérêts que par l'intérêt général. Sony Labou Tansi en particulier, fait une critique très violente des pouvoirs africains et surtout politiques.
Ces pièces de théâtre sont essentiellement des tragédies. Mais on trouve aussi à côté des textes plus légers, plus proches de la comédie qui dénoncent les moeurs, les problèmes du peuple : la polygamie, la mariage forcé, l'animisme ...
- Aujourd'hui cette frontière n'existe plus. Dans la même pièce, l'intime voisine avec le politique. Les grands problèmes nationaux tels que les questions sociales et les grands problèmes internationaux se confondent pratiquement.
Un exemple : La pièce "Récupérations" du dramaturge togolais Kossi Efoui* : Elle raconte l'histoire de gens qui vivent dans les bas-fonds de la ville; un matin le maire décide de moderniser le quartier; on va donc le raser pour cause de salubrité publique. L'histoire est amenée de telle façon que ce n'est pas la relation entre la population en tant que groupe et le maire en tant que pouvoir qui est racontée. C'est comment chacun dans sa vie, dans sa cabane de carton, gère cette urgence-là. Les grandes questions mondiales sont vécues à travers les relations d'un homme et d'une femme par exemple, ou entre deux enfants...
Kossi Efoui : Dramaturge et romancier né au Togo, il est l’auteur notamment de :
- La Fabrique de cérémonies (Seuil) 2001 (Matricule N°35)
- La Polka (Seuil) 1998
- La Malaventure (Lansman) 1998
- Le Petit Frère du rameur (Lansman) 1998
- Récupérations (Lansman) 1992
C'est le grand changement du théâtre moderne. On n'a plus les grands sujets d'un côté, les petits problèmes de l'autre. Il s'ensuit des difficultés pour déterminer s'il s'agit de tragédie ou de comédie. On peut cependant affirmer que les grandes tendances sont au triste, au sombre, à l'obscur, à la douleur. Les pièces actuelles font naître plus les larmes que le rire, même si on peut en rire malgré tout, si on prend du recul : une façon très saine de garder la tête froide.
D'autre part, on a tous été piégés par Sartre et Camus. Tous les intellectuels d'Afrique sont très gauchisants. Les écrivains prétendent à un certain engagement. Il n'y a pas seulement chez eux le désir de raconter une histoire, de susciter des émotions; il y a aussi la prétention que la parole théâtrale doit faire bouger quelque chose dans la tête et dans le coeur des gens. D'où l'ambiance sombre et douloureuse dans laquelle l'histoire est racontée.
Mais on se rend compte que cette écriture se diversifie et se complexifie beaucoup. Des rencontres et des expérimentations nombreuses sont organisés avec les formes traditionnelles de la théâtralité qui sont souvent des formes de théâtre de rue, de théâtre où la coupure entre la salle et la scène n'est pas très nette. En Afrique, toute la communauté fait du théâtre, joue une cérémonie et il y a beaucoup d'auteurs qui essaient de retrouver, de récupérer ces techniques, ces procédés-là dans leur écriture.