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Année 2021-2022


"Lectures partagées" continue durant l'année 2021-2022. Une activité appréciée à côté des livres nomades pour permettre aux lecteurs de faire de belles découvertes de lecture et de les partager avec les autres.

Littera 05 vous invite donc à venir aux dates qui seront indiquées prochainement ci-dessous, présenter un livre , actuel ou ancien, que vous aimeriez partager avec d'autres amoureux de la lecture .Vous pouvez aussi venir seulement pour écouter


Cette année "Lectures partagées" aura lieu au salon de thé

"Thé pas chez Mémé"

21 Rue Colonel Roux à Gap

de 18h à 19h30

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Lectures partagées du 2 juin 2022

5 participantes.

Film "La ruche"

Film dur d’après une histoire vraie. On voit toutes les séquelles d’après guerre entre serbes et croates. Petit village du Kosovo où on retrouve des charniers. Les femmes sont seules, les maris ont disparu. Les femmes n’ont pas le droit de travailler mais il y a des bouches à nourrir, alors il va bien falloir les laisser faire. C’est l’évolution des mentalités peu à peu que montre le film. L’actrice principale a des ruches et elle apprend peu à peu à s’en occuper et faire le miel. Les femmes s’entraident pour préparer l’anjar, de la purée de poivrons qu’elles vont vendre dans les grandes surfaces. Un très beau film qui passe au Club.

Seyvoz de Maylis de Kerangal et Joy Sorman - Ed Inculte, 2022

Écriture à quatre mains par ces deux femmes amies qui partagent l’amour des grands espaces. Le barrage de Seyvos est le jumeau de celui de Tignes. Le livre a deux écritures, une noire, une bleue, non pour séparer les auteures mais pour séparer les histoires, celle du barrage et celle de Tomi Motz, l’ingénieur.
Quand il arrive sur le site, l’atmosphère est étrange, il voit sur le lac des auréoles qui semblent remonter du fond du lac. Il attend, sa montre s’est arrêtée. Les personnes qui devaient l’accueillir ne viendront pas.
La mémoire du village détruit 50 ans plus tôt n’a pas disparu. Est-ce que ce sont des signes ? Les morts qui ont été déterrés, des fantômes ? Une manière originale d’évoquer le passé.

Joy Sorman est romancière et chroniqueuse de télévision et animatrice radio, notamment à France Inter. Son dernier livre « à la folie » est le fruit d’une année passée à étudier les fous dans un hôpital psychiatrique.

La sonate oubliée de Christiana Moreau - Poche, 2019

L’auteure est une autodidacte belge artiste plasticienne. 1er roman paru en 2017 remarqué par quelques prix littéraires. Il s’agit de deux récits, 1 contemporain, une jeune violoncelliste d’origine italienne vit à Sorin en Belgique. Elle doit se présenter à un concours et cherche une partition originale. Son ami, Kevin, lui fait cadeau d’une boîte ancienne avec à l’intérieur un journal intime et une partition. Le journal nous transporte à Venise au 18ème siècle où vit Ada dans un pensionnat qui s’occupe des orphelins. Elle est également violoncelliste et c’est elle qui a écrit la partition mais anonymement, elle fait croire que c’est Vivaldi. Les deux récits vont se rejoindre, le plus passionnant est celui se passant à Venise.

Depuis, Christina Moreau a écrit « Cachemire rouge » en 2021 et « la dame d’argile » en 2022.

Ceux qui s’aiment se laissent partir de Lisa Balavoine

C’est une histoire de femmes, de relation compliquée fille, mère. L’auteure avait quelque chose à dire à sa mère.

La mère a eu son enfant très tôt, trop tôt, elle est généreuse mais fantasque, tête en l’air, instable et hors sol. Elle déménage tout le temps, change de comportements, d’idées, d’envies, de compagnons, elle se met à boire, va tomber en déchéance. Les trajectoires s’éloignent, Lisa va au contraire, s’élever, s’éloigner, grandir, s’envoler et se mettre à détester sa mère. Je t’aime, je te hais. En fil rouge, il y a tout le temps des tortues dans le livre auxquelles l’enfant s’ attache tandis que la mère s’en moque. La carapace, une protection imaginaire ? Le comportement de la mère est celui d’une innocente en quête permanente d’amour mais incapable d’en donner vraiment. C’est une belle histoire.

Dix-sept ans d’Eric Fottorino - Gallimard, 2018

L’auteur parle de sa mère et du secret qu’elle a fini par lui avouer. Enceinte très tôt, à 17 ans, sa famille catholique l’envoie à Nice pour cacher sa grossesse dans une institution religieuse. On lui a pris l’enfant, une petite fille, au moment de l’accouchement pour le donner à une bourgeoise bordelaise. Eric Fottorino a parlé dans ses livres précédents de ses deux pères, celui qui l’a conçu et abandonné pour retourner vivre dans son pays le Maroc et celui qui l’a élevé, un juif tunisien très aimant. Il poursuit son exploration de sa filiation. Ce livre sur sa mère est très émouvant et bien écrit.

Le jeune homme de Annie Ernaux -

Ce livre écrit il y a une trentaine d’années est le dernier paru. Il raconte sa relation amoureuse avec un jeune homme qui l’admirait, un jeune prolo, étudiant sans argent. Elle en fait son gigolo tout en restant dans son monde. C’est une attaque contre une relation suivie. Sans s’attarder sur la relation sexuelle, c’est la façon de décrire le jeune homme qui est ignoble. Elle le rabaisse, le méprise intellectuellement. Pour cela le livre est dérangeant.

Elisée avant les ruisseaux et les montagnes de Thomas Giraud - La Contre Allée, 2020

C’est par des chemins de traverse que Thomas Giraud évoque l’enfance d’Elisée Reclus, ce géographe rêveur et anarchiste. Pour échapper aux discours moralisateurs et rigoristes de son père pasteur calviniste torturé, Elysée s’égare sur les chemins, ramasse des cailloux, profite des méthodes d’éducation non conventionnelles de sa mère qui l’entraîne dans l’exploration de la nature. Thomas Giraud nous invite à suivre les pas d’Elisée en émaillant le récit de ses notes appelées « bouts de pensées » qui nous font découvrir sa révolte, ses interrogations, ses réflexions déjà empreintes de philosophie. L’écriture est poétique et sensible.

Extraits de bouts de pensées :

« Est-ce que la goutte d'eau que je caresse à un endroit du ruisseau aura la mémoire de ma caresse, plus loin, au moment de se jeter dans un fleuve ? Et cette mémoire, l'eau l'aura-t-elle encore au moment de se jeter dans la mer ? Et si ce sont des mots, resteront-ils prisonniers dans les gouttes jusqu'à la mer ? Est-ce que je peux marquer la nature, sculpter cet espace ? Est-ce que je peux raconter la nature en prenant des parties se fondant dans un tout ? » « On ne peut pas vivre avec humanité et manger des animaux. Les manger, c'est d'abord les tuer, lâchement, après avoir organisé soigneusement leur vie pour en faire une petite vie. Je ne veux que regarder les animaux. Apprendre en les observant. »

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Lectures partagées du 5 mai 2022

5 participantes.

Fille - Camille Laurens - Gallimard, 2020

Camille Laurens raconte son histoire : petite fille, elle a été abusée par son grand oncle. De la naissance à l'enfance, puis de l'enfance à la maturité jusqu'au jour où ele devient mère à son tour, elle parle d'une façon différente des étapes de sa vie : Quand elle était bébé, elle utilise le "tu" pour s'adresser au bébé jusqu'à l'âge de 3 ans. A 3 ans elle emploie le "je". Elle dit "elle" quand elle parle du viol et puis revient au "je" quand elle a 11 ans. Une façon de se mettre à distance pour cette période traumatisante.
Etre fille, femme puis mère, toutes ces étapes ont été marquées par des événements tragiques : le viol, la perte d'un enfant, des déceptions amoureuses... Ajouté à cela la déconvenue de ses parents d'avoir une fille alrs qu'ils auraient voulu un garçon et cette déception elle l'a toujours ressentie. Etre mal accepté, être jugé parce qu'on est fille, ce n'était pas rare dans les années 50 - 60, époque à laquelle Camille Laurens a placé son histoire. De plus Camille avait une grande soeur, vrai garçon manqué, alors qu'elle, était très féminine.
Camille Laurens raconte son vécu, son parcours de vie avec une finesse et une ironie qui
donnent une légèreté au récit bien souvent tragique.

S’adapter de Clara Dupont Monod - Stock – Prix Goncourt des lycéens, prix Fémina 2021

Ce roman a déjà été présenté aux Lectures partagées du 6 Janvier 2022.
La lectrice qui présente le livre ce jour, a voulu mettre l'accent sur quelques points qui lui ont paru essentiels :
- la vision de l'enfant handicapé par le frère aîné très protecteur alors que la soeur est dans le déni et la rébellion
- La belle relation entre la soeur et la grand-mère
- Les difficultés rencontrées par les parents
- Le rôle du troisième enfant qui remplace l'enfant handicapé décédé.

Paresse pour tous - Hadrien Klent - Le Tripode, 2022

Et si on ne travaillait plus que trois heures par jour ?
C'est un Prix Nobel d'économie, Emilien Long, qui fait cette proposition dans "Le droit à la paresse au XXIe siècle", un essai qu'il a écrit. Son livre obtient un succès tel que le débat s'enflamme et que surgit une idée folle : les élections présidentielles ne sont pas loin; pourquoi ne serait-il pas le candidat de cette idée ? Ses amis le poussent à accepter pour montrer au monde qu'on peut faire changer la société pour que les hommes découvrent le bonheur de vivre.
Hadrien Klent est invité par Littera pour présenter son livre, le lundi 23 mai 2022 à la Nouvelle Librairie à Gap.

Les enfants de la Volga - Gouzel Iakhina - Les Ed. Noir sur Blanc, 2021 - Traduit du russe par Maud Mabillard

Le livre est écrit autour d'un fait historique : une communauté allemande, à la recherche d terres à cultiver, a été implantée au bord de la Volga au XVIIIe siècle. Les membres de cette communauté vont vivre toute l'histoire de la Russie, tout en gardant leur langue, leur religion et leur culture. Ils ont pu faire prospérer la région jsqu'à la révolution de 1917. A partir de cette date, ils vont subir le même sort tragique que les Russes : guerre civile, collectivisation forcée, famines, grandes purges staliniennes, jsqu'à la déportation en Sibérie en 1942. Cette déportation massive traduisait la peur de Staline qu'ils ne s'allient avec l'armée allemande.
On suit en particulier la vie de Bach et Klara, un jeune couple qui s'est installé dans une ferme isolée où ils vivent au rythme de la nature. Mais la tragédie va les rattraper ...
Après le destin des Tatars, sujet de Zouleïkha ouvre les yeux (Noir sur blanc, 2017), son premier roman, Gouzel Iakhina (née en 1977) se penche sur le destin d' une autre minorité opprimée , les Allemands de la Volga.

Nature humaine - Serge Joncour - Flammarion, 2020 - Prix Fémina 2020

Raconte trente années d’histoire de la France rurale, des années 1976 jusqu’au premier jour de l’an 2000, à travers l’histoire d’une famille paysanne dont la ferme se situe au hameau des Bertranges, dans le Lot, où vit la famille Fabrier.
Les personnages : Un couple de paysans qui sont encore à la ferme au début du livre et qui vont la quitter pour s’installer seuls dans une maison. Ils ont quatre enfants qui au début du livre vivent à la ferme, un garçon et trois filles. Les trois filles au fil des années vont quitter la ferme pour travailler et vivre en ville. Le fils Alexandre, lui, restera à la ferme pour continuer le travail des parents, et c’est lui le personnage essentiel du livre, celui que l'auteur appelle "le fils sacrificiel".  
Le livre commence en 1976, année de la grande sécheresse pour se terminer fin 1999, où la France a vécu deux terribles tempêtes. Entre ces deux événements , Serge Joncour montre comment les changements dus au progrès, aux luttes qui ont jalonné cette fin de millénaire, ont percuté de plein fouet une famille paysanne française. La question essentielle posée par l'auteur est : notre humanité est-elle en péril ? A moins que la nature ne reprenne ses droits ...

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Lectures partagées du 7 avril 2022

10 participantes.

– Les vilaines de Camila ….

Avis très positifs pour ce livre de notre sélection.

– La légende de nos pères de Sorj Chalandon - Poche, 2011

Suite à la rencontre avec Sorj Chalandon, l’envie de relire certains de ses livres. La Légende de nos pères est précurseur. L’enfant n’a pas encore ouvert les yeux sur la mythomanie paternelle. Il y a encore du respect et de la naïveté qu’il perdra peu à peu dans Profession du père et de façon plus brutale dans Enfant de salaud.

– Revenir à toi de Leonor de Recondo - Grasset, 2021

L’auteure d’origine espagnole est violoniste baroque et cela se sent dans son écriture très musicale. C’est l’histoire d’une comédienne qui doit jouer une pièce classique. En sortant de la répétition, son agent lui dit qu’on a retrouvé sa mère qu’elle n’a pas vue depuis une vingtaine d’années. Bouleversée, elle part, aussitôt, sans bagages et découvre que sa mère habite près du canal du midi dans une demeure insalubre. Elle n’ose pas rentrer. Elle tourne autour, campe à côté, s’empare d’un pull qui lui rappelle quelque chose. Elle met en rapport ce qu’elle vit et la pièce qu’elle va jouer. Il y a une finesse pour s’approcher des gens malades, il y a beaucoup de silences. L’écriture, moins fluide que celle de ses livres précédents, est resserrée. Il y a de la brutalité. Savoir qu'une mère vit dans la déchéance. Elle utilise le sens du toucher, la voix, il y a beaucoup d’accrocs et elle s’ancre dans le sol, le réel pour ne pas sombrer.

– Le fils de l’homme de Jean-Baptiste del Amo - Gallimard, 2021

Difficile à lire au début. Il commence par une chasse cruelle qui ne s’explique qu’à la fin. Une femme vit avec son petit garçon et un homme veut les emmener de force dans une maison en très mauvais état en pleine nature où ils sont très isolés. Le climat va peu à peu se dégrader. C’est une tragédie. La nature est hostile. Réussite de l’écriture qui correspond à l’action et au décor. Pas d’analyse psychologique. Tout est dit par les descriptions, la précision du vocabulaire. C’est un livre fort. Parallèle avec Sorj Chalandon pour cette histoire commune sur la violence familiale.

– Seyvoz de Maylis de Kerangal et Joyce Sorman - Ed. Inculte-Dernière Marge, 2022

Écriture à quatre mains par ces deux femmes amies qui partagent l’amour des grands espaces. Pour écrire l’histoire du barrage de Seyvos, elles sont allées sur le site du barrage de Tignes. Le livre a deux écritures, une noire, une bleue, non pour séparer les auteures mais pour séparer les histoires, celle du barrage et celle de Tomi Motz, l’ingénieur. L’aventure se situe sur 4 jours. Rien ne se passe comme prévu. Personne n’accueille Tom Motz, ni sur le site, ni à l’hôtel.
Les deux auteures se sont amusées à mêler une écriture précise, très technique à des incursions dans le fantastique qui pourraient faire songer à Game of Thrones. Roman surprenant et écologiquement engagé.

– Celui qui veille de Louise Erdrich - Sarah Gurcel (traduction) - Albin Michel, 2022

Inspiré de l’histoire de son grand-père, ce livre est très documenté et très personnel. Louise Erdrich, la grande voix de l’histoire indienne au Canada nous livre ici un récit passionnant et comme toujours profondément incarné. Bien qu’il y ait de nombreux personnages attachants, on suit surtout Thomas, veilleur de nuit dans l’usine de pierres d’horlogerie de la réserve de Turtle Mountain (le grand-père de Louise Erdrich) et également président du conseil tribal , celui qui veille sur son peuple, déterminé à lutter contre le projet du gouvernement canadien d’émanciper les Indiens à seule fin de leur enlever leurs terres et les quelques droits octroyés jusque là et va devoir, pour ce faire, fédérer les Indiens et aller jusqu’à Washington pour défendre les siens.

Extrait : « On a survécu à la variole, à la carabine à répétition, à la mitrailleuses Hotchkiss et à la tuberculose. À la grippe de 1918 et à quatre ou cinq guerres meurtrières sur le sol américain. Et c'est à une série de mots ternes que l'on va finalement succomber. Réallocation, intensification, terminaison, assurer et caetera ».

Et Pixie, sa nièce, jeune employée Chippewas de l’usine, au fort caractère qui ne veut ni mari, ni enfants et va entreprendre un voyage jusqu’à la grande ville, Minneapolis pour retrouver sa sœur disparue. Elle va découvrir ce monde inconnu et sordide des femmes soumises à la prostitution et en sortira renforcée, déterminée à accomplir son propre destin.

Ce livre ne nie ni la complexité des rapports humains entre les indiens eux mêmes, ni celle de l’ambiguïté de certains personnages, mais l’écriture rend l’émotion, la grande humanité qui transcende, la place importante des femmes, des mères dans la transmission, la protection des valeurs, la passion pour la boxe qui est aussi libératrice que délétère

« Qui donc veille, cette nuit, de par les collines ?

Une jeune femme de plus en plus ravie actionne le tambour rotatif d’un duplicateur à alcool. Un missionnaire dégingandé trébuche dans son sommeil sur une route gelée. Une Indienne traditionnelle masse avec de la graisse d’ours un bébé qui peine à dormir. Un très vieil homme parle aux petites lumières venues lui rendre visite, et une très vieille femme rêve farouchement qu’elle a traversé les remous de la Red River pour échapper à ses ennemis. »

– Madame Hayat de Ahmet Atlan - Julien Lapeyre de Cabanes (Traduction) -
Actes Sud, 2021

Gros coup de coeur. Pas de date mais époque contemporaine. Pas de pays nommé mais il y a une grosse censure et on comprend que c’est en Turquie. Ce livre a été écrit en prison.

3 histoires d’amour : la première entre le jeune homme, Fazil, et la littérature, la seconde entre lui et une femme plus âgée, Mme Hayat, la troisième entre lui et une jeune étudiante, comme lui déclassée socialement.

Ces deux étudiants pauvres vont être figurants dans une émission de télévision où ils rencontrent Mme Hayat, peu cultivée mais très séduisante. Elle initie le jeune homme à l’amour. Sila veut quitter le pays pour ne pas être compromise dans les malversations et dérives du gouvernement. Fazil est plus hésitant, il est partagé. L’écriture est très belle, souple élégante.

 

Lectures partagées du 3 Mars 2022

- Franck Pavloff, L'espérance est ma patrie -

Nous recevrons Pavloff le 26 mars, c'est donc une présentation succincte pour donner envie de venir l'écouter. En Estonie, un frère et une sœur, meurtris par la vie, se retrouvent à propos de l'héritage de leur père, disparu de leur vie depuis leur enfance.

- Pierre Jerawan, Tant qu'il y aura des cèdres

1er roman. Enfant, le narrateur a été emmené en Allemagne par ses parents pour fuir la guerre au Liban. Son père, grand conteur, disparaît, et l'enfant s'isole avec la nostalgie de son père et du Liban.
Il y retourne adulte, et découvre un Liban bien différent de celui rêvé.
L'intérêt de ce roman, réside dans la psychologie de l'enfant et la description du Liban des années 90.

- Sarah Manigne, Quitter Madrid (Mercure de France, prix Femina 2020)

Alice est restauratrice de tableaux, et spécialisée dans de ceux de Zurbaran. Elle se trouve à Madrid au moment de l'attentat de la gare d'Atocha en 2004. Elle en sort indemne, mais très traumatisée. Le livre est un aller/retour entre son métier et sa souffrance, entre douceur et violence.
Ce livre est érudit, mais pas pédant.

- Bérengère Cournut, Née contente à Oraibi (le Tripode, 2016)

Histoire d'une petite fille en territoire hopi. Découverte des croyances, des fêtes, de la vie quotidienne des hopis. Importance de la terre-mère. Délicatesse dans l'écriture très resserrée.

- Giosuè Calaciura, Le tram de Noël (Notabilia, 2020) Illustrations de Gérard Dubois

Le soir de noël, un tram déambule dans la ville de Rome. A chaque arrêt, qui correspond à un chapitre, montre un personnage. Ce sont tous des personnes en grande précarité, confrontés à la solitude, la violence sociale. Roman poignant.

- Marie Vingtras, Blizzard (Ed. de l'olivier, 2021)

En Alaska, une femme et un enfant dans le blizzard. Le petit garçon disparaît. Pendant trois heures, c'est la course contre la montre pour le retrouver, avec les rares habitants de ce bout du monde. On suit l'histoire de chaque personnage. Un fil invisible les relie. Secret et douleurs. Livre bien construit, écriture ciselée.

- Marie-Hélène Lafon, Chantiers (Ed. des Busclats, 2015)

Livre sur son travail d'écriture.

- Thomas Giraud, Le bruit des tuiles ( Ed. la contre-allée, 2021)

1850, Victor Considérant, disciple de Charles Fourier, veut construire une communauté de vie inspirée des phalantères (ou familistères) dans une région aride près de Dallas. Ce sera Réunion.

Thomas Giraud sera présent à Gap, à la Loupiote, le 25 mars.

 

Lectures partagées du 6 Janvier 2022

9 participantes.

La plus secrète mémoire des hommes de Mohamed Mbougar Sarr -Prix Goncourt 2021 – Philippe Rey et Janssen

Avis partagés. Ce livre a été très apprécié par plusieurs membres de Littera et a suscité l’envie d’en faire un article de journal, une émission de radio et l’objet d’une lecture à voix haute. Cependant, tout le monde ne partage pas cet enthousiasme. Le livre est jugé trop complexe, trop intellectuel. Un Goncourt qui ne fait pas l’unanimité. On peut cependant souligner qu’il a été élu au premier tour de scrutin par un jury qui a souhaité privilégier la qualité littéraire. Se reporter au site de Littera où l’auteur et ses livres sont décrits en détail.

– S’adapter de Clara Dupont Monod - Stock – Prix Goncourt des lycéens, prix Fémina 2021

Roman basé sur l’histoire personnelle de l’autrice. Un enfant lourdement handicapé naît dans une famille unie qui vit à la campagne dans les montagnes des Cévennes. Il y a déjà deux enfants, un frère aîné, une sœur cadette et sur le tard viendra un troisième enfant, un garçon. Tous trois vont exprimer leur point de vue, le rapport qu’ils ont avec l’enfant et la façon dont cela a changé, façonné leur existence, l’aîné de la fratrie va s’attacher profondément, presque démesurément à cet enfant inadapté, la cadette (l’autrice) va le rejeter, exprimer une grande colère, elle sera dans le déni, le petit dernier va apaiser les passions. L’originalité du récit tient au fait que ce sont les pierres qui témoignent et prouvent ainsi l’importance du lieu. Un livre très poignant, très émouvant. Emission de radio à écouter sur le site de Littera.

– Trilogie de Aki Shimasaki – Actes Sud

Autrice japonaise vivant au Canada. Son écriture est d’une infime délicatesse, raffinée, poétique et très épurée.

Elle écrit des pentalogies, de courts romans qui peuvent se lire séparément mais constituent un cycle.

– « Fuki no to » fait partie du troisième cycle, « l’ombre du charbon » : un couple vient d’hériter d’une ferme dans la banlieue de Tokyo. Pour les aider, Atsuko embauche une de ses amies de jeunesse et part en voyage avec elle, son mari ne pouvant pas se libérer. Une évocation très pudique de l’homosexualité qui reste un sujet tabou au Japon.

– « Sémi » fait partie du quatrième cycle et vient de paraître en 2021 : un vieux couple confronté à la maladie d’Alzheimer.

– Black Girl de Zakiya-Dalila-Harris – Rentrée janvier 2022 – Calmann Levy

La jeune Nella Rogers travaille à New-York dans une prestigieuse maison d'édition. Cependant, elle souffre d’être la seule noire au milieu d’un personnel exclusivement blanc. Elle est mal à l’aise dans sa peau de noire. Arrive une autre jeune femme noire, Hazel, elle a de longues dreadlocks sublimes, et revendique haut et fort sa culture afro-américaine. Elle incarne exactement le type de femme que Nella aimerait être. Mais peu de temps après l'arrivée de cette nouvelle collègue, Nella se sent observée et commence à recevoir des lettres de menaces...

– Les garçons de la cité jardin de Dan Nisand - ED. Les Avrils, 2021

L’auteur a lui même grandi dans cette banlieue de Mulhouse où se situe la cité jardin Hildenbrandt destinée à l’origine à constituer un bel environnement pavillonnaire, un cadre de vie agréable mais qui est devenue une zone où vit la famille Ischard, un père et ses trois fils. Au début du livre, il n’y a que Melvil, le plus jeune, qui prend soin de son père. Les deux frères Virgile, l’aîné engagé dans la Légion et Jonas sont des voyous, des violents mais Melvil, bien que très différent, les admire. En attendant, il travaille et se cherche, il est ami avec un jeune handicapé et un homme plus âgé et très instruit, persécuté parce qu’il est héritier de la famille Hildenbrandt. Melvil est plus doux que ses frères et ne se résout pas à ce déterminisme social. Quand ses frères reviennent, il sera face à ses propres choix . L’écriture est vive, puissante, énergique. « Melvil revient à lui, clignote, tremble un peu. Il n'a pas tout à fait entendu le mot, mais la masse extraordinaire du mot est venue le bousculer comme un engin glissant sur son erre, locomotive ou ferry-boat que nul obstacle ne retient et qui balaye sans le moindre soubresaut tout ce sur quoi sa trajectoire le précipite. le jour déferle par les fenêtres ouvertes, baignant la pièce d'une lumière d'évanouissement. »

– Où vivaient les gens heureux de Joyce Maynard - Traduction : Florenc Lévy-Paoloni - Ed Philippe Rey, 2021

Eleonor revient dans un endroit qu’elle a beaucoup aimé, une ferme où elle a été heureuse. Elle a perdu ses parents très jeune. Elle est écrivain, achète une maison à la campagne, se marie, a trois enfants. Pour Eleonor, c’est le bonheur, elle adore ses enfants mais on sent qu’un drame va se produire car la vie peut être merveilleuse et tragique. Joyce Maynard explore avec acuité ce lieu d'apprentissage sans pareil qu'est une famille, et interroge : jusqu'où une femme peut-elle aller par amour des siens ? Eleanor y répond par son élan de vie. Son inlassable recherche du bonheur en fait une héroïne inoubliable, avec ses maladresses, son intelligence, sa vérité et sa générosité. C’est un portrait de femme très positif.

– Le voyant d’Etampes de Abel Quentin- Les editions de l'observatoire, 2021

Le héros de cette histoire ou plutôt l’anti héros, Jean Roscoff est un professeur d’université qui n’a pas eu la vie dont il rêvait, compagnon de route du socialisme, membre de Sos racisme, il est en décalage avec la société contemporaine et ne comprend plus les débats d’idées qui la traversent. Il pose un regard lucide et sans concession sur son histoire, les occasions manquées, les mauvais choix pour sa carrière (son livre sur les époux Rosenberg est arrivé au mauvais moment et n’a pas eu de succès) sa vie de famille, divorcé, il est toujours attiré par son ex femme. Il se lance dans l'écriture d'un livre « Le voyant d'Étampes », essai sur un poète américain méconnu qui se tua au volant dans l'Essonne, au début des années 60. Il fréquentait Sartre et ses amis et avait choisi de se réfugier à la campagne. Jean Roscoff a reconstitué la vie du poète, son engagement communiste en Amérique, la qualité de ses poèmes mais il a oublié de mentionner qu’il était noir. Va s’en suivre une chasse aux sorcières à l’envers et se mettre en action un déferlement d’accusations sur les réseaux sociaux . Ce livre parle du wokisme, du déterminisme, du féminisme. Abel Quentin a une plume acerbe, un humour noir et se pose en témoin des déviances identitaires de notre société.

– La décision de Karine Tuil - Gallimard, 2022

La juge Alma Revel doit se prononcer sur le sort d'un jeune homme suspecté d'avoir rejoint l'État islamique en Syrie. À ce dilemme professionnel s'en ajoute un autre, plus intime : mariée, Alma entretient une liaison avec l'avocat qui représente le jeune homme mis en examen. Entre raison et déraison, ses choix risquent de bouleverser sa vie et celle du pays... Karine Tuil nous entraîne dans le quotidien de juges d'instruction antiterroristes, au cœur de l'âme humaine. Il y a une tension constante et toutes les questions posées nous interpellent. Un roman saisissant de justesse.

– Watergang de Mario Alonso - Le Tripode, 2022

C’est un roman paysage. Paul a douze ans et habite dans un petit village perdu au milieu des polders. Il y vit avec sa mère, divorcée et contrainte de travailler dans un supermarché, et sa grande sœur, pas encore tout à fait sortie de l’adolescence mais déjà enceinte. Son père est parti refaire sa vie de l’autre côté de la mer. Paul n’est pas un garçon comme les autres, il voudrait être écrivain. Il passe ses journées à courir le long des canaux, au bord de l’eau, et à remplir son carnet de notes farfelues sur tout ce qu’il voit. Il donne la parole à tout ce qui l’entoure, personnes, éléments, ville, sans distinction. Il donne vie à la nature dans son ensemble. C’est frais et beau.