Un portrait virtuose de "Peintre Paul", qui nous montre un Cézanne obsédé par son art et sa rage au travail.
Crasseux, ronchon, son chevalet accroché à son dos, il arpente inlassablement les collines et les sous-bois qui l'amèneront (on le devine) vers sa chère montagne.
« Peintre Paul marche. Il n’a qu’une vague idée d’où l’emmène le chemin entre collines et vallons. Il ne veut aller nulle part, de toute façon. Ses bottes écrasent des touffes de thym. Il admire l’indifférence des pins, le dédain des genêts, la placidité des falaises.(…) Peintre Paul sue sous les couches de grosse toile, mais n’enlève pas sa veste. Stoïque comme Hannibal traversant les Alpes ou Burton à la recherche des sources du Nil. Tout au plus il sort son pénis pour arroser un roc d’urine. Les fourmis, agacées, détalent. Il remballe son engin, rajuste son barda et continue son ascension. »
Il est à la recherche de la lumière que le soleil ou les ombres éclaboussent sur le paysage et qui donnent aux couleurs toute leur intensité. Aux sensations visuelles s'en ajoutent d'autres, celles que l'on respire, que l'on goûte, que l'on touche.
C'est un portrait cru que nous livre l'auteur : « C’est un vieil homme à la moustache épaissie par la morve, à la barbe raide de graisse de mouton, à la corolle de cheveux blancs s’écartant des oreilles comme les orties s’écartent du chou-fleur, aux dents gâtées par l’insouciance du fumeur, aux yeux chassieux où les images du monde ne rentrent qu’à reculons. Son pantalon est grossier, sa veste épaisse, son col raide, son chapeau melon cabossé, son élégance toute relative. On dirait un forgeron invité à la remise de diplôme de sa nièce. Le monde a déposé sa poussière sur l’homme ; il chaloupe en marchant. »
Peu aimable, pour ne pas dire asocial, il malmène son entourage et c'est l'occasion pour l'auteur de nous donner un aperçu de la peinture de l'époque vue par Cézanne qui n'hésite pas à démolir ses contemporains : Il déteste la peinture du Hollandais d'Arles; Rembrandt est un couillon pleurnichard... un crouteux; il méprise Gauguin et Arcimboldo; il s'est disputé avec Renoir : sa peinture est mauvaise...
C'est un artiste solitaire, isolé du monde dans lequel il ne se reconnait pas.
Un jour il découvre dans la pinède le corps d'une jeune femme .....
(Présentation : Anne-Marie Smith)
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Mika Biermann est né en Allemagne, mais écrit directement en français. Après ses études de Beaux-Arts à Berlin, il s’est installé à Marseille, où il exerce la profession de guide de musée.
Ayant une formation d'artiste-peintre, j'ai abandonné la peinture de grand format au début des années 90 pour me concentrer sur le dessin et sur l'écriture, qui est devenu mon occupation principale. Je poursuis néanmoins mon activité d'artiste-plasticien dans des résidences internationales.
(Agence régionale du livre -Provence, Alpes, Côte d'azur)