Le narrateur, écrivain lui aussi, revient dans son pays natal, après 20 ans d’exil, en France et en Allemagne. Ce narrateur ressemble beaucoup à l’auteur (exilé lui aussi, revenu dans son pays,). Autobiographie ? L’auteur s’en défend et affirme que c’est une fiction, mais on ne peut pas s’empêcher d’y penser, d’autant plus que le pays ressemble beaucoup au Togo, d’où est originaire l’auteur. On peut peut-être parler d’autofiction inconsciente. En tout cas le narrateur veut se réhabituer à son pays qu’il a quelque peu oublié, dans le but d’écrire un livre. Aussitôt arrivé, il va voir une ancienne amie installée dans le même pays. C’est elle qui l’avait mise au défi d’écrire un livre sur son pays. Voulant rencontrer des gens susceptibles de l’aider dans sa démarche, elle lui présente Eric Bamezon, un haut fonctionnaire qui est très au fait des arcanes du pouvoir. Celui-ci est revenu depuis trois ans dans son pays après avoir fait ses études à Paris, comme le narrateur. Il a voulu faire profiter son pays de ses nouvelles connaissances de jeune diplômé, pour participer à son redressement. Mais au lieu de trouver un homme brillant et sensible, heureux de ses choix et de son travail, c’est un être désabusé et brisé qu’il rencontre, un être qui s’est fait prendre au piège du bon vouloir du Président, un dictateur assassin : Le Président prend plaisir à assister à l’agonie de ceux qu’il empoisonne ; voilà ce que je dois côtoyer. Moi qui ai rêvé de me consacrer à l’art. Et Bamezon sait qu’il est condamné.
Au fur et à mesure des pages, la pression s’intensifie et nous lecteurs, comprenons que le dénouement sera tragique, inéluctablement. Mais ce qui est encore plus violent, c’est le regard sombre et sans concession que l’auteur porte sur l’Afrique. Vous verrez qu’il n’épargne à aucun moment son pays, et plus que son pays, l’Afrique elle-même. Lisez et découvrez les jugements et les reproches acerbes et violents qu’il adresse à l’Afrique. Un constat qui peut surprendre. En tout cas le récit qu’il fait, dans une écriture coup de poing, nous tient en haleine jusqu’au bout.
(Présentation : Anne-Marie Smith)