Trois nouvelles en liaison avec l'océan, avec surtout des hommes qui vivent sur les bateaux, loin de leur pays et de leur famille.
Océan Pacifique :
C'est à une explosion atomique à Mururoa que vont assister les marins de cette première nouvelle. Les moyens de protection sont inexistants et quand le souffle a traversé le navire, les hommes de l'équipage restent pétrifiés, prenant conscience de l'horreur de la situation. Le narrateur va chercher à comprendre, il interroge un de ses copains particulièrement désorienté par l'événement, mais celui-ci est dans une telle détresse que la parole ne naîtra qu'après des actes d'une grande violence.
..."Je ne l'ai pas pris dans mes bras parce que je ne savais pas comment m'y prendre. Mais je me suis rapproché un peu de lui, jusqu'à ce que j'entende sa respiration. Alors tout a cessé : le crépitement du feu, le mouvement des flammes, même l'épouvantable odeur a disparu. Il n'est plus resté que Moriaty et moi, sur ce petit bout de terre, au milieu de l'océan, cernés par les ténèbres comme deux petits garçons "...
Giovanni :
Un bateau appareille vers le large. Le narrateur raconte la vie qui s'écoule dans ce monde clos : la prise de quart au milieu de la nuit, la veille interminable avec le regard fixé sur l'horizon pendant des heures, la promiscuité dans la cabine de l'équipage, le sommeil long à trouver dans le bruit de la cabine, une cigarette partagée, les photos que l'on accroche au-dessus de sa couchette, et aussi l'intense souffrance de la solitude, un monde d'hommes où priment la force et la violence, le silence digne que l'on garde après un passage à tabac douloureux... Le peu d'humanité que l'on sent est apportée par un chien abandonné sur le navire depuis longtemps et devenu la mascotte des marins, celui à qui on peut parler.
..."J'étais fatigué, la nuit était passée, et nous manquions tous de bonté à bord. Alors je me suis mis à pleurer. Je pleurais sur moi, sur Giovanni et le vrai Giovanni. Puis j'ai joint les mains derrière la nuque et resserré mes bras sur les tempes, et alors j'ai pleuré sur la mère de Bocchi, et sur toutes les mères qui ignorent combien nous souffrons." ...
Bateau sous la neige :
On retrouve dans cette nouvelle deux personnages très présents dans l'oeuvre de Mingarelli : un père et son fils. Svevo a signé un engagement dans la marine. Il va quitter la maison où il vit avec son père, mais avant il monte sur le toit de leur maison pour mettre dans sa tête des images qui l'aideront à vivre. Mais la vraie raison n'est pas là : "je voulais que tu me voies là-haut en rentrant", avoue-t-il à son père.
Les relations père - fils ne sont pas toujours faciles mais la tendresse est toujours là.
Des textes où les hommes vivent dans une grande solitude, où le mal-être est permanent avec des moments de grande souffrance. Comment en serait-il autrement dans ce monde clos où la parole est absente, que les blessures sont à fleur de peau et que la pudeur empêche les gestes d'apaisement et d'amitié ?
(Présentation : Anne-Marie Smith)