Ce livre nous offre le récit d’une tranche de vie de l’auteure, ses années de préadolescence. Goliarda Sapienza nait en 1924 et passe toute son enfance à Catane en Sicile, dans une famille de libertaires. Les parents, très engagés politiquement et vivant sous la menace des milices fascistes et de la mafia, sont souvent absents.
Goliarda, élevée hors les normes sociales en vigueur à l’époque, grandit dans un climat de grande liberté, entourée de ses six frères et sœurs. Elle est éduquée par l’un de ses frères et par un professeur particulier, situation qui lui laisse beaucoup de temps libre et lui permet d’explorer à loisir les vieilles ruelles de la ‘casbah’ de Catane, de se frotter au petit peuple qui vit-là, de plonger dans le noir de la salle du cinéma Mirone.... où elle va rencontrer Jean Gabin dans le film ‘Pépé le Moko’. Elle reconnait en lui -- et fait de lui-- son alter ego.
Dans sa famille, la vie est matériellement difficile, Goliarda doit ‘gagner’ les quelques sous pour payer ses entrées au cinéma… Mais la vie y est d’une grande richesse affective et intellectuelle : l’engagement politique, les livres et la culture en constituent trois piliers fondamentaux. « Toujours en-dehors de tous les pouvoirs établis », seuls mais avec l’orgueil de connaître la rectitude propre aux outsiders.
Le lecteur se retrouve dans la tête de cette gamine, suivant ses rêves, ses raisonnements, ses audaces, ses questionnements tout empreints de la fraîcheur de l’enfance. Nous la voyons partir à la conquête de sa propre vie, Jean Gabin en filigrane.
Comme dans son livre majeur L’art de la joie, l’écriture de Goliarda Sapienza est lumineuse.
Présentation : Danièle Alloin