Dans ce livre autobiographique, l’auteur, journaliste, scénariste et écrivain, né à Berlin Est raconte, à travers son histoire, celle de ses grand-pères Gérard et Werner et celle de ses parents Anna et Wolf et leurs difficultés à évoluer dans la période de l’entre-deux guerres. Dans son prologue il résume « Notre famille était une sorte de RDA en miniature. C’est là que se déroulaient les affrontements qui ne pouvaient avoir lieu ailleurs, c’est là que l’idéologie rencontrait la vie. »
Sur le mode narratif et par chapitres thématiques, l’auteur explore le passé d’une idéologie à laquelle ont pu adhérer les allemands. Il cherche à comprendre les choix de vie de ses parents, sa mère adhérente au régime malgré ses doutes, son père dissident passif, au travers de l’histoire de ses grands pères. Gerhard, père d’Anna a combattu le nazisme avec les résistants français et participe à la création de la RDA pour une société plus juste, qu’il transmet à sa fille. Wolf lui ne partage pas les espérances de son épouse. Werner, le grand-père paternel, revient en 1947 à Berlin et dans sa famille, brutal et aigri après sa captivité et « se prouve, à lui comme aux autres,qu’un enfant d’ouvrier peut arriver à quelque chose dans ce nouvel état. » Plus loin l’auteur conclut « Je crois que pour mes deux grands pères la RDA était une sorte de pays de rêve où ils ont pu oublier tout ce qui les avait accablés jusque-là. »
Si eux n’ont pas vu le mensonge, leurs enfants « projetés dans l’univers onirique de leurs pères, ont dû partager leurs rêves, qu’ils l’aient voulu ou non. » Comme cette génération, ils ont vécu, chacun à leur façon, la chute du régime et la réunification, ce qui pour la mère de l’auteur journaliste propagandiste du régime communiste, a été un grand désenchantement.
Le propos est dense, sans pathos et sans jugement et l’on s’attache successivement à chacun des personnages dans leur vécu. Dans ce récit, on parcourt une tranche d’histoire qui relate la facilité de l’embrigadement et les difficultés à se faire une idée juste de ce que l’on vit.
(Présentation : Annie Contin)