Un recueil de nouvelles. Melinda Moustaki , petite fille de pionniers, est née en Alaska . Agée d’à peine trente ans, elle nous offre avec « Alaska » un recueil de nouvelles au goût âpre et fort.
Un album de famille. Le fil du récit est tout d’abord obscur : l’auteure bouscule les plans temporels, la narration émane de plusieurs voix . . . Puis, de page en page, le cadre se précise et les liens s’éclairent entre les différents personnages. C’est le Nord, la terre d’origine, et c’est un album de famille que l’on feuillette, en noir et blanc ou couleur sépia. Et les scènes au cadrage approximatif se succèdent de façon hachée comme autant d’extraits de vidéos d’amateur.
Correspondances 1. Les protagonistes sont, comme l’Alaska, rudes et sauvages ; Ils vivent, plus ou moins mal, de la pêche, de la chasse, dans la nature. Les cabanes sont bancales et les toilettes à l’extérieur. Chez ces gens là, on endure, on encaisse, on n’a peur de rien. On boit aussi, beaucoup.
Correspondances 2. Comme dans la nature, la violence est présente dans la relation des parents avec leur progéniture. Le langage y est cru et les coups arrivent vite : l’existence, ça blesse. Il y a la faim parfois, les corvées toujours, et c’est aux ainés de s’occuper des plus petits. Les mères « animales « (« Polar Bear » c’est le surnom de l’une d’elles) sont des femmes fortes mais inquiétantes.
Correspondances 3. « À la vie, à la mort », les liens familiaux résistent pourtant. La difficile relation mère – fille se reproduit sur deux ou trois générations et les rapports fraternels sont riches. Ainsi, alors qu’ils sont devenus adultes, Gracie prend soin de son frère Jack, elle ne le lâche pas : comme il l’a protégée petite, elle sera toujours là pour lui. Au delà de la férocité, il y a dans ces récits une grâce, l’indestructible attachement des humains entre eux.
Nature Writing . Les animaux sont protagonistes. Truites arc-en-ciel, saumons king size, baleines à bosse, ours et élans, aigles, sont hameçonnés, harponnés, assommés, abattus, dépecés. Haches pour le bois à fendre, couteaux et fusils : tout est danger, rude et froid comme la neige qui recouvre les hectares de forêt, comme les galets et le fracas de la rivière Kenai.
« Alaska », comme la morsure du froid, nous rappelle que nous sommes faits de chair mais que c’est aussi en fonction de la température affective extérieure que bat notre cœur.
Présentation : Tiziane Champey