Dans les onze nouvelles de ce recueil, Brigitte Giraud raconte la fin de l'amour : le moment où tout bascule, quand on prend conscience que le désir s'en est allé, quand les gestes de l'habitude ont remplacé ceux de la passion.
"C'est la fin de l'histoire et vous ne le savez pas. Il est là, debout devant la fenêtre, et vous lui en voulez de masquer la lumière. Ce n'est pas lui que vous voyez mais le jour qu'il empêche d'entrer. ça commence comme ça. Il est là et sa présence vous gêne. Vous ne l'attendez plus. Vous rentrez le soir et vous allumez la radio. Un baiser distrait après avoir quitté vos chaussures. Le silence tout de suite après. Vous ne savez comment c'est arrivé "...
Et quand le moment de la séparation arrive : "J'ai maintes fois imaginé ce moment. Toi ouvrant la porte de l'appartement avec la clé que tu as encore. Toi venant inventorier nos objets communs pour décider de ce que tu prends, de ce que tu laisses. Je t'avais proposé, confiante, de faire le choix toi-même, j'avais ajouté, pour rendre palpable ma grandeur d'âme, que je n'attachais aucune importance aux objets. On n'allait tout de même pas s'abaisser à s'affronter sur le terrain du monde matériel..."
L'échec, la séparation, la fin et l'avant-goût de la fin, quand l'amour s'éteint. Plusieurs nouvelles racontent quand l'un des deux s'en va. Mais Brigitte Giraud raconte aussi l'instant où l'enfance s'arrête pour une petite fille de dix ans qui voit sa mère partir et l'abandonner; la culpabilité des parents qui se séparent vis à vis de leurs enfants à qui ils proposent une garde alternée: "Vous aurez papa d'un côté et maman de l'autre... Vous verrez c'est une grande aventure, papa et maman voudront tout le temps vous faire plaisir, vous aurez deux Noël et deux anniversaires, et aussi deux chambres et deux télévisions... Vous allez devenir des aventuriers des temps modernes, toujours en mouvement, un petit balluchon sur le dos ...Vous pourrez vous permettre presque tout, parce que vous souffrirez, vous entendrez dire que vous êtes perturbés, vous aurez de mauvaises notes à l'école et ce sera normal , vous aurez de bonnes notes, et ce sera inespéré, vous aurez des migraines, vous aurez mal au ventre et ce sera logique, quoi que vous fassiez, ce sera la faute de vos parents séparés...."
D'autres histoires sont encore plus émouvantes parce que c'est la mort qui a emporté l'être aimé et celui qui reste se débrouille avec l'absence. Brigitte Giraud évoque le drame de Vilnius, la douloureuse mort de Marie Trintignant, et elle n'oublie pas Bertrand Cantat qui entrait dans un "long tunnel de silence et de solitude" parce que pour lui aussicommençait le temps du deuil.
Ces onze histoires très courtes nous émeuvent et nous atteignent parce que dans l'une ou l'autre il y a notre vérité, il y a ce que l'on ne veut peut-être pas entendre. La dernière nouvelle est plus lumineuse. Je ne la dévoilerai pas. Nous retrouvons Brigitte Giraud dans ce trajet où nous l'avions accompagnée dans son livre "A présent".